Le Voyage à Nantes a organisé à l’été 2025 une exposition consacrée à Katsushika Hokusai, peintre japonais (1760-1849) dont l’oeuvre se situe à l’apogée du mouvement artistique Ukiyo-e.
L’Ukiyo-e
A partir des années 1600, la société japonaise prend ses distances avec un ordre social ancien élitiste et fermé ; la nouvelle classe sociale bourgeoise et commerçante s’ouvre à une culture plus populaire et partagée (théâtre, peinture…). S’agissant des arts graphiques, le mouvement artistique Ukiyo-e fait partie de ce renouvellement, même s’il conserve encore quelques influences chinoises. On peut le traduire en français par «image du monde flottant». Mot d’origine bouddhique, Ukiyo désigne la résignation face à l’impermanence du monde, l’éphémère, l’importance de vivre le moment présent dans la contemplation de la nature et la méditation ; le « e » désigne l’image en tant que telle. Toutefois, s’il rompt avec les académismes de l’époque, sa production reste soumise au contrôle de l’Etat et les œuvres ne peuvent être exposées ou vendues sans l’apposition de son cachet officiel.
Les thèmes explorés (les courtisanes, les paysages, les animaux, les créatures mythiques…) plaisent à la classe aisée qui contribue à sa promotion et à son succès au sein même de la société japonaise. Mais son succès dépasse les frontières grâce à la multiplication des échanges commerciaux, à l’époque via les compagnies hollandaises seules autorisées à l’époque à accéder au marché japonais par le port de Nagasaki. Ainsi les sociétés européennes, et leurs artistes, développent progressivement un japonisme inspirant. Cette évolution artistique sera d’autant plus remarquable que les nouvelles techniques d’estampes (polychromie, laque noire) et de reproduction (application successive de différentes couches de couleurs par estampe) permettent la reproduction à moindre coût ; les étoffes et le mobilier deviennent également porteurs d’oeuvres d’art et se disséminent dans le monde.
Hokusai
Prolifique sur la durée et la quantité, Hokusai laisse un travail monumental composé essentiellement de dessins, livres, peintures et gravures réalisés au cours de ses 70 années de travail et de ses 93 déménagements à travers le Japon. Ses milliers d’oeuvres sont encore aujourd’hui source d’inspiration ; lui-même se surnommait « Gakyo Rojin » (le vieillard fou de dessin).
Ici sont évoqués les thèmes importants pour l’artiste, dont ses livres sont parfois un condensé.
LES FEMMES
Hokusai les représente souvent avec un visage ovale mélancolique. Il s’agit souvent de « Tayu », c’est-à-dire des courtisanes de haut rang dont les connaissances culturelles (éducation, étiquette) et pratiques artistiques (danse, chant, musique, poésie, calligraphie, cérémonie du thé…) les élevaient bien au-dessus du rang de simple prostituée.



LA NATURE
Hokusai peint les plantes (textures et couleurs) et les animaux (mouvements).



LES PAYSAGES
La représentation des paysages est soit imaginaire pour sa parabole, soit interprétée pour l’Histoire.


Mais l’oeuvre essentielle d’Hokusai concerne les ponts, le mont Fuji et l’eau auxquels il consacrera plus particulièrement les vingt dernières années de son existence.
LES PONTS
Hokusai peint des paysages imaginaires dans lesquels des ponts tissent des passages entre les hommes.


LE MONT FUJI
Pendant les années 1830 à 1834, l’artiste s’est consacré à ses « trente six vues du mont Fuji ». Mont sacré du Japon entouré de cinq grands lacs, c’est le plus grand des trois volcans du Japon, symbole d’éternité. La légende dit qu’Hokusai y vit depuis sa mort.


L’EAU
Caractérisée par son graphisme, elle est présente tout au long de l’oeuvre d’Hokusai (pluie, mer, rivières, lacs, chutes), lequel met en valeur ses mouvements, ses scintillements, ses gouttelettes, ses éclaboussures dans un ensemble marqué par la fraîcheur et la dynamique.



Mais c’est en 1831 à la fin de sa vie qu’il peint sa célèbre gravure « au revers d’une vague au large de Kanagawa », dans laquelle deux barques de pêcheurs font face à une grande vague, avec le mont Fuji en arrière-plan. Il a su y dessiner le déchaînement de la mer, restituer sa force de vie et de mort, et sans doute symboliser l’impermanence des choses et la fragilité de l’homme face à l’énergie de la nature et de sa pérennité représentée par le mont Fuji.
